Ce que vous allez apprendre dans cet article :
- Maîtriser l’usage des métaphores
- Mieux les choisir, mieux les exploiter
Les métaphores sont très utiles aux écrivains, à condition de bien les employer. 3 trucs d’écriture tirés de la pratique.
Dans un autre article, nous avons vu pourquoi il fallait se méfier des métaphores : elles ne sont jamais loin du cliché, elles n’expliquent rien, et elles impliquent une philosophie que vous n’assumez pas forcément.
À présent, je vais vous donner 3 règles pour dompter et utiliser superbement cette figure de style. Pour que votre écriture, ici comme ailleurs, soit assumée et accomplie.
1. Consommez les métaphores avec modération
Pour diminuer les risques de l’abus de métaphores, rien de tel qu’un peu de sobriété :
- surveillez votre écriture. Dans votre relecture, traquez les métaphores invisibles, implicites. Ne gardez que celles qui apportent vraiment une information nouvelle au lecteur ;
- Donnez vous un quota (par exemple une comparaison par page) et ne le dépassez pas. Supprimez-impitoyablement tout ce qui dépasse le quota. Si vous avez peur de gâcher, servez-vous du « frigo littéraire » ;
- lorsque vous en avez choisi une, faites-la travailler à fond. Filez-la, rappelez le phore aussi souvent qu’il le faut. Une seule métaphore filée comme un fromage ( !) vaut mieux qu’une accumulation de petites métaphorettes. L’accumulation ennuie et dilue. En revanche, une métaphore solitaire et bien exploitée peut donner à votre récit une force immense.
2. Revisitez le cliché
Le cliché est-il odieux ? Oui… en général. Parfois, le cliché, l’idée reçue, vous sembleront incontournables, indépassables. Dans ce cas, emparez-vous du cliché avec toute votre fougue, avec tout votre enthousiasme d’écrivain. Revisitez le cliché, la tournure connue, la métaphore éculée ; décalez-la, formulez-la autrement, attaquez-la pour mieux l’accepter. Montrez que vous savez ce que vous voulez dire, que vous avez comparé en connaissance de cause.
Ex. : « Kévin faisait peur à ses camarades. Il était fort comme un turc. » -> « On prétendait qu’il avalait un kefta veau-poulet à chaque petit-déjeuner. En tout cas, il avait la force d’un lutteur turc. »
3. Faites entendre l’écho métaphorique
Allons plus loin que l’idée du « filage » développée plus haut. Mettons que vous vous fixez comme quota, pour tout votre roman : un personnage = une métaphore. Vous allez devoir la choisir pour qu’elle fasse sens.
Mais une fois que vous l’aurez choisie, gardez-la en tête, même si vous ne la formulez que tard dans l’histoire.
En revanche, dialoguez avec elle, interrogez-la, réinvestissez-la, donnez-lui des résonances nouvelles et secrètes.
Par exemple, vous comparez votre héroïne à une plante. Disons… à un tournesol, tiens. Eh bien, si vous parlez de son enfance, racontez une scène mémorable où la petite est rentrée à la maison avec de la terre plein les bas de pantalon. Une autre fois, faites-lui porter un foulard jaune etc.
Une telle métaphore, déclinée au maximum, présente de fascinants effets d’écho. Grâce à elle, votre texte se ficelle, se noue sur lui-même, et finit par donner une impression d’évidence.
Faites l’expérience de cet « écho métaphorique ». Tout le monde ne l’entendra peut-être pas à la lecture, mais vous, oui. Ce jeu d’échos vous aidera grandement à développer vos personnages tout au long de l’histoire.
C’est même lui qui vous fera retrouver l’amour de votre histoire, dans les moments de découragement. Il vous rappellera que vous écrivez quelque chose d’unique.
Et maintenant, mon lyrique internaute, en avant ! Livre-nous ta belle trouvaille métaphorique !
hello, un pti mot pour dire que l’idée de l’echo métaphorique a fait son chemin dans ma tête, lors de ma dernière séance d’écriture je me suis bien amusée à rester en effet sur une comparaison implicite entre un personnage et un chien de garde domestique. C’était même bien plus facile d’imaginer la scène, puisque j’imaginais d’abord la réaction de l’animal, puis je la transposais au personnage ! Donc merci pour l’idée !
ça donnait : Une fois qu’elle avait mordu dans sa prise, elle ne lâchait jamais le morceau /
Keïtan ne me quittait pas des yeux. Ses petites pépites noires avaient alors une douceur terriblement apaisante./ Keïtan bien sûr, encore et toujours, ne relâchant pas son attention un instant, aussi bienveillante qu’un chien teigneux.
(cette dernière phrase me gêne un peu mais je ne sais pas bien comment faire, peut être la liaison entre bienveillance et être teigneux qui semble contraire. L’idée c’est qu’elle a une bienveillance déterminée, hargneuse ‑sans exclure une certaine douceur comme le montre les yeux).
Je me suis aussi amusée à chercher des variantes aux expressions communes, ainsi sortir la tête de l’eau devint garder la tête hors du foin (c’est un peuple vivant dans un milieu semi-aride, ils ont des bêtes et des cultures. Pas évident d’ailleurs sur le long terme, puisqu’ils ne connaissent pas la mer).
Je cherche aussi des variantes au langage vulgaire moderne, et là c’est pas évident ! Il y a un perso que je fais jurer de la sorte « crotte de bouquetin en rut », ou sa variante « merde de bouc » mais si j’ose dire, on a a plein la bouche. Il me manque une expression plus courte :s
Merci pour ce précieux feedback !
N’est-ce pas que cet usage de la métaphore est très enrichissant ?
Oh je suis fière de moi. J’avais trouvé toute seule l’effet d’écho, sur un personnage surtout, possédant un lien particulier avec les volatiles et qui se retrouve parfois assis sur le rebord d’une fenêtre, comme prêt à s’envoler ou qualifié de « oiseau de mauvais augure », qui ne vit que dans des appartements situés en hauteur ou se réfugie sur des toits (genre toits d’immeubles) quand il a besoin de calme etc. Je n’ai pas osé le nez en bec d’aigle… non, c’est pas le bon pigeon. 😉
Au boulot maintenant ! Me reste la traque des métaphores non voulues (la partie 1/2). J’avoue que ça, je n’y avais pas pris garde (en tout cas pas sciemment), même si dans mes relectures j’essaie de rendre la compréhension évidente et donc jette pas mal de phrases (ou de morceaux) qui, au final, embrouillent la phrase au lieu de l’éclairer. J’espère avoir involontairement procédé de la même manière pour les métaphores !
Merci pour ces pistes d’amélioration !
La démarche me paraît être la bonne : simplifier est la clé !
Bonne chasse !