Ce que vous allez apprendre dans cet article :

  • Pourquoi la concor­dance des temps est non négociable
  • Les 3 « bat­te­ries » de temps verbaux

La concor­dance des temps est une exi­gence de tout texte de type récit. Comment fonc­tionne cette concor­dance ? Comment ne pas se tromper ?

Le choix du temps de son récit fait par­tie de ces ques­tions que le jeune auteur éva­cue d’un revers de main. Il en résulte des manus­crits sans aucune tenue, que l’éditeur trou­vera du der­nier ridicule.

Description du pro­blème, expli­ca­tions, et solutions.

Conjuguer ses talents ? Et puis quoi encore ?

Le pas­sage du manus­crit au livre, chez le cor­rec­teur de la mai­son d’édition, est trop sou­vent l’occasion d’une bagarre achar­née : le récit fourni par l’écrivain passe allè­gre­ment d’un temps à l’autre, sans aucune cohé­rence. C’est une pitié de voir la concor­dance des temps, cotillons à l’air, subir les der­niers outrages.

Sur ce point, les écri­vains les plus let­trés ne sont d’ailleurs pas les plus fiables. Un des der­niers livres sur les­quels j’ai tra­vaillé, œuvre d’un prof’ de fran­çais, regor­geait entre autres balour­dises de rap­ports ver­baux tota­le­ment irréels.

Lorsque vous écri­vez, rap­pe­lez-vous une règle simple : RIEN, je dis bien RIEN, ne jus­ti­fie une entorse au temps géné­ral que vous avez choisi (pas­sage du sys­tème “passé” au sys­tème “pré­sent” et vice-versa). Ceux qui voient là des fleurs de style, des élé­gances, sont de la der­nière mau­vaise foi.

Pourquoi s’accrocher à la concor­dance ? A cause de l’illu­sion roma­nesque. Chaque ensemble de temps ver­baux place le lec­teur dans une situa­tion de récep­tion dif­fé­rente. Changer de sys­tème en cours de route, c’est lui rap­pe­ler de façon déplai­sante qu’il était dans l’illu­sion. C’est perdre tout le béné­fice de l’illu­sion, et du récit.

Hélas, même si vous savez vous tenir à vos choix, vous ren­con­tre­rez vite une dif­fi­culté incon­tour­nable : la plu­part des temps “inté­res­sants” (nar­ra­ti­ve­ment par­lant) sont des temps com­po­sés ou de conju­gai­son rare. Les temps com­po­sés rajoutent à votre prose des enfi­lades d’auxiliaires, et les conju­gai­sons rares donnent au dis­cours une appa­rence de pré­cio­sité, par­fois tout à fait parasite.

La concordance des temps et la loi du moindre effort

Mais le plus grand fac­teur de confu­sion dans le domaine des temps ver­baux, c’est la flemme des écri­vains eux-mêmes. Toutes les excuses sont bonnes pour aller au plus facile, c’est-à-dire à un indi­ca­tif pré­sent sans relief, où l’on ne risque pas de se cas­ser la figure en bout de ligne.
“Texte qui a du punch”, “ça donne du rythme au récit”, “cher­cher un ton plus moderne, plus actuel”, “j’ai choisi le pré­sent his­to­rique”, “je veux racon­ter les choses telles qu’elles se passent immé­dia­te­ment”… voici quelques excuses “idéo­lo­giques” que l’on entend, ou qu’on lit au détour des forums d’écrivains.

Toutes sentent à plein nez le refus de tra­vailler son texte.

Le choix du temps ver­bal, comme tous les autres choix, doit être fait en connais­sance de cause, et jamais pour se faci­li­ter la tâche.

J’ai relevé, à l’usage, 3 bat­te­ries de temps ver­baux, 3 ambiances ver­bales, avec cha­cune ses avan­tages et ses incon­vé­nients. Pour chaque texte, la ques­tion tech­nique doit pri­mer : vu ce que je veux racon­ter, quel temps est pré­fé­rable ? Si votre his­toire “dix-neu­vième” doit s’écrire au pré­sent, elle sera au pré­sent. Si votre nou­velle d’anticipation a besoin des plus-que-par­faits, pas d’hésitation !

La concordance des temps sur le champ de bataille de la littérature
La bat­te­rie des temps ver­baux…
… prête à don­ner de la voix.

Les 3 batteries de temps verbaux

1. Le “passé” classique

En gros, impar­fait + passé simple. C’est l’emploi le plus tra­di­tion­nel. Je sup­pose que cet usage nar­ra­tif a découlé de la forme “conte” (on pré­ten­dait racon­ter des choses vraies mais ayant eu lieu dans un temps fort loin­tain). Le gros avan­tage de la pano­plie “passé” est sa sub­ti­lité : en jon­glant entre les dif­fé­rents temps pos­sibles, l’auteur dis­pose de tout un jeu d’antériorité et de pos­té­rio­rité. Ces nuances sont par­fois indis­pen­sables, dans le cas d’un récit com­plexe, farci d’enchâssements.

2. Le “présent

Ici, la lit­té­ra­ture reçoit sans doute une forte influence de l’écriture ciné­ma­to­gra­phique (à cause du temps stan­dard de rédac­tion des scé­na­rios de film). L’indicatif pré­sent paraît plus “moderne”, plus sexy. Mais il donne très vite, si l’on n’est pas un très bon sty­liste, une impres­sion de pla­ti­tude. À noter que l’on parle par­fois de pré­sent “his­to­rique” (« Napoléon, en cette fin de 1812, res­sent déjà ce froid qui va l’emporter quelques années plus tard »). Ce n’est pas parce qu’il est “his­to­rique” que vous pou­vez l’employer à tort et à tra­vers. Il n’y a pas de rai­son : si vous le choi­sis­sez, soyez-lui fidèle dans tout votre livre.

3. Le “passé composé

Inauguré d’après moi par Camus dans L’Étranger. Comme pour la contre­basse, il faut un cer­tain talent pour arri­ver à en tirer quelque chose. Le passé com­posé devient vite très morne. Pourtant, il offre un bon com­pro­mis entre la richesse des temps du passé (il per­met le jeu passé com­po­sé/im­par­fait/­plus-que-par­fait) et la valeur d’“impact” du présent.

Pas d’à-peu près (ou alors pas trop ; enfin vous voyez l’idée générale, quoi)

Au passé, il existe un petit piège gram­ma­ti­cal qui a d’énormes consé­quences sur le SENS de votre texte : la proxi­mité entre l’imparfait et le passé simple, à la pre­mière per­sonne du singulier.

Si vous écri­vez « Priscilla vou­lait que je lui fisse la lec­ture. Je lui octroyai donc ce plai­sir tous les soirs », vous avez fait une erreur, à mi-che­min entre la faute de style et la faute de gram­maire (oui, il y a double peine, dans ce cas-là).

Si vous écri­vez « Priscilla vou­lait voir Rambo III. Après m’être fait prier, je lui pas­sais son étrange don­daine », vous faites une nou­velle double faute. Cela va com­men­cer à faire beau­coup de pri­son. Et je ne parle pas des goûts dis­cu­tables de vos fré­quen­ta­tions en matière de films…

Dans le pre­mier cas, il s’agit d’une action régu­lière : impar­fait. Dans le deuxième cas, d’une action ponc­tuelle : passé simple. Cette dif­fé­rence d’un “s”, entre les deux formes ver­bales, place votre lec­teur dans le bon ou le mau­vais angle de vue. Ne lais­sez pas ce doute de conju­gai­son en sus­pens ; trans­po­sez-la phrase au plu­riel (Nous lui octroyions… ») et éli­mi­nez le flou artistique.


Nous avons donc passé en revue, sur cette ques­tion des temps ver­baux et de leur concor­dance, quelques élé­ments objec­tifs. Car ici comme pour beau­coup de points de style, la grande théo­rie, le sen­ti­men­ta­lisme vous mène­ront au n’importe quoi.

Le style est une néces­sité. Vous le res­sen­tez peut-être comme une contrainte. Petit à petit, appre­nez à en faire une force.

Et ne ces­sez pas de conju­guer : il n’est rien de plus beau.


Et toi, rou­cou­lant inter­naute, quelle est ton arme pré­fé­rée ? Passé clas­sique, pré­sent, passé composé ?

32 commentaire

  1. Kanata a dit :

    Dans mes pre­miers écrits, j’étais tota­le­ment perdu, entre pré­sent, passé com­posé, passé simple et impar­fait, ça par­tait dans tous les sens. Ensuite c’est ren­tré dans l’ordre avec Passé simple / Imparfait. Et puis j’ai expé­ri­menté avec le pré­sent… et là je me suis encore perdu ! Un de mes manus­crits alterne même passé et pré­sent en fonc­tion du point de vue du pro­ta­go­niste. Finalement, je reviens au passé, ça me semble plus natu­rel (par contre, oui, j’use du pré­sent his­to­rique dans le cas d’énonciations glo­bales type encyclopédique)

    1. nicolas a dit :

      Voilà le genre de par­cours que je veux mon­trer : on com­mence par essayer n’importe quoi, plus c’est com­pli­qué et plus ça a l’air chouette. Et puis on éli­mine les pro­blèmes un par un, et on arrive à un fonc­tion­ne­ment simple et clair. La sim­pli­cité est un com­bat de titan.

  2. lolodubain a dit :

    Priscilla vou­lait que je lui fasse la lec­ture. Je lui octroyai donc ce plai­sir tous les soirs. »
    C’est exac­te­ment ce genre de phrase qui quel­que­fois me pose problème.
    Priscilla vou­lait que je lui fasse la lec­ture. Il lui octroya donc ce plai­sir tous les soirs. »

    Ce n’est pas tou­jours évident…
    Pierre

  3. Gwenny a dit :

    Article inté­res­sant.

    Donc, si j’ai bien com­pris, l’alternance des temps est impos­sible, ou du moins incor­recte, c’est bien ça ?
    Parce qu’en ce qui me concerne, je le fais beau­coup mal­heu­reu­se­ment et je me pose d’ailleurs beau­coup de ques­tions là-dessus.
    Est-ce tout aussi incor­rect d’écrire un récit au passé et y intro­duire quelques phrases au pré­sent pour expri­mer un point de vue géné­ral ou habituel ?
    Doit-on vrai­ment gar­der le même sys­tème de temps du début à la fin du roman ?
    Merci d’avance pour la réponse

    1. nicolas a dit :

      L’alternance est pos­sible mais en res­pec­tant des « jeux », des « groupes » de temps qui fonc­tionnent ensemble. Même pour expri­mer un point de vue géné­ral, la ques­tion mérite réflexion.

      Je prends un exemple : « Intimidé, il remon­tait la rue de l’Arbalète. Les mai­sons, les mêmes depuis le XIIIe siècle, (don­ner) une ambiance toute spé­ciale à ce vieux coin de ville. » Une action, et une explication.

      « don­naient » ou « donnent » ? Bien sûr, il s’agit d’une expli­ca­tion qui est valable pour « il », mais aussi pour le nar­ra­teur, et pour nous, lec­teur, quel que soit l’année où on lit le texte.
      Pourtant, ce qui est inté­res­sant, dans ce pas­sage, est d’expliquer ce que le per­son­nage res­sent. Il est donc plus impor­tant de pla­cer l’explication dans le cadre tem­po­rel sub­jec­tif du per­son­nage. Donc il vaut mieux, je pense, faire concor­der les temps : « donnaient ».

      J’espère avoir répondu à votre question ?

  4. Joanne a dit :

    Je viens de décou­vrir votre site et je suis vrai­ment impres­sion­née par son contenu.Des conseils judi­cieux qui me seront très utiles.Merci de par­ta­ger votre savoir.

    À 58, j’en suis à mon pre­mier essai dans l’écriture d’un roman.J’ai beau­coup de dif­fi­culté avec la concor­dance des temps.Imparfait ou passé simple ? Je me pose sans cesse la question.

    Pour résumer,j’utilise l’imparfait,le passé simple et le passé com­posé dans la narration.Pour ce qui est du dis­cours, j’utile le pré­sent de l’indicatif le plus sou­vent et le passé composé.

    Quand je relis mon texte,je m’aperçois que je glisse occa­sion­nel­le­ment un verbe au pré­sent dans ma narration.
    Je me demande si cela est jus­ti­fié dans cer­tains cas.

    Exemple : Une jour­née à se pré­las­ser dans la cha­leur du foyer.Pourtant, nous nous trou­vions dans le cime­tière de cette petite ville où je suis née, où j’ai grandi, à l’endroit même où reposent depuis plu­sieurs années, mes parents, Hélène Deschênes et Antoine Normandin.

    Merci de votre aide.

    1. nicolas a dit :

      Attention, comme je l’explique, le passé com­posé est a priori incom­pa­tible avec tout le reste…

      « Pourtant, nous nous trou­vions dans le cime­tière de cette petite ville où je suis née, où j’ai grandi, à l’endroit même où reposent depuis plu­sieurs années, mes parents, Hélène Deschênes et Antoine Normandin. »

      L’usage du pré­sent place cette indi­ca­tion dans le temps du nar­ra­teur, et la sépare du récit. Les parents reposent à cet endroit au moment où l’histoire est racon­tée, et pas for­cé­ment au moment où elle se déroule. Cela paraît assez incon­gru à la lec­ture. Si vous l’insérez, au contraire, dans la conti­nuité du récit (« où repo­saient »), l’intérêt de la pré­ci­sion est plus évident : c’est au moment où la scène se passe que vos per­son­nages se rap­pellent qui est enterré là, non ?

      Vous ne pour­rez pas, avec un même verbe, évo­quer à la fois le passé et le pré­sent. Le choix le plus logique, d’après moi, serait le passé.
      Si vous tenez vrai­ment à rac­cor­der cette indi­ca­tion au nar­ra­teur, au moment où il écrit, vous pou­vez uti­li­ser, mais c’est plu­tôt lourd, une astuce comme celle-ci :
      « à l’endroit même où repo­saient depuis plu­sieurs années, mes parents, HD et AN (et où, d’ailleurs, ils reposent toujours) ».

  5. Andrea a dit :

    Etrangement, quand je me suis mise à écrire, j’avais décidé (entre autres règles idiotes) d’utiliser exclu­si­ve­ment le pré­sent pour ma nar­ra­tion, un peu pour les rai­sons citées dans cet article (flemme.… et le passé simple, je trou­vais que ça fai­sait guindé, old fashion, bref, dans mon cer­veau, ça son­nait « beurk »).
    Et je l’ai fait.
    Toute façon, je m’en fichais : je ne vou­lais pas écrire pour faire lire, et puis fran­che­ment, ma nar­ra­tion se résu­mait à deux-trois détails scé­na­ris­tiques sans inté­rêt ni impor­tance. J’ai déjà ren­con­tré là une dif­fi­culté de taille : la nar­ra­tion au pré­sent est très com­pli­quée à mettre en scène ! Mais j’ai tenu bon (ima­gi­nez la petite barque faite à la main avec les moyens du bord, per­due dans une tem­pête en pleine mer… c’est l’impression j’ai eue en me reli­sant, avec le recul !!)
    Et puis un jour, je l’ai fait lire à une amie. Entre temps il s’était écoulé, quoi ? un ou deux ans, trois peut-être. Pour évi­ter des gri­bouillis incom­pré­hen­sibles, je me suis quand même lan­cée dans le reta­page du tout sur pc, et j’étais lit­té­ra­le­ment hor­ri­fiée du résul­tat xD Ce qu’il faut savoir, c’est que j’ai dû repas­ser une troi­sième fois des­sus (oui, je suis insis­tante) avant de tout modi­fier, et je décerne la médaille du cou­rage à ma pauvre lec­trice qui a dû tout se lire dans l’état (ou presque).
    Finalement, j’ai tout remis au passé (imparfait/passé com­posé), qui fina­le­ment, me venait beau­coup plus natu­rel­le­ment… et dont j’avais par­semé mon récit spo­ra­di­que­ment en oubliant ma « bonne » réso­lu­tion du début.
    Bref, moi, mon seul remède a été le temps, et sur­tout la relec­ture ! (et un peu de matu­rité dans le domaine de l’écriture, ce qui n’était pas mon fort au départ). L’avantage, c’est que je ne pense pas être une buse en conju­gai­son ni en ortho­graphe en géné­ral, donc je sais où employer un passé simple à la place d’un impar­fait et vice versa.
    Ce qui n’empêche mal­heu­reu­se­ment pas les fautes. Personne n’est par­fait. Mais en géné­ral, je finis par les retrouver 😉
    La concor­dance des temps par contre, c’est plus déli­cat, et quand il s’agit de plus-que-par­fait voire de sub­jonc­tif, j’avoue que je m’y perds parfois…

    En tout cas, merci de ces billets très construc­tifs et pas dénués d’humour ! Soit on apprend des choses, soit on se les remé­more, et ça ne fait de mal à per­sonne (enfin… je crois… non ?).

    1. nicolas a dit :

      Le phé­no­mène que vous décri­vez est valable pour tout un tas de dif­fi­cul­tés d’écriture : dans l’immédiat, on est satis­fait de ce qu’on a écrit, et on refuse de voir les fai­blesses du texte, même les plus mani­festes. Et puis le temps passe, on se sent de plus en plus étran­ger à celui qui a écrit ces mêmes lignes il y a si longtemps…

      Lorsque les écri­vains expliquent qu’il faut du temps pour écrire, il ne s’agit pas (seule­ment) de temps d’écriture effec­tive. Ils pensent aussi au temps du regard cri­tique, je dirais presque du « reniement »…

  6. helsat a dit :

    On peut pen­ser que l’utilisation du pré­sent donne au texte un côté plus « dyna­mique » et effec­ti­ve­ment plus moderne, mais j’ai l’impression qu’on le trouve sou­vent dans des romans soit bâclés, soit qui se veulent ori­gi­naux, (ou bien par­ti­cu­liers car je crois me sou­ve­nir que Stephen King l’a par­fois uti­lisé dans Carrie, pour décrire le tumulte de l’esprit de l’héroïne, mais tout le monde n’est pas Stephen King) et l’intérêt de l’histoire est sou­vent laissé de côté au pro­fit d’un exer­cice de style pas tou­jours très chouette.
    C’est sûr que quand on pense au pré­sent, on ima­gine un texte du style « le jour­nal de Bridget Jones » réso­lu­ment dyna­mique et tous n’ont pas envie d’écrire de cette façon moderne, et tous les textes ne le jus­ti­fient pas. Toutefois, il serait dom­mage d’être rebuté par le pré­sent, qui peut don­ner un résul­tat assez poé­tique par­fois (Alice Hoffman dans « la lune tor­tue ») pour peu que l’on se contente pas de décrire bête­ment le dérou­le­ment d’une scène, mais qu’on fasse l’effort de tour­ner des jolies phrases, du moins c’est mon avis.
    Pour ma part j’ai ter­miné une his­toire de fan­tasy écrite entiè­re­ment au pré­sent en essayant de res­pec­ter cette règle. Pas pour faire genre, sim­ple­ment parce que les phrases et les idées me venaient plus faci­le­ment comme ça. Alors même si je ne suis pas encore pas­sée au stade où j’ose la faire lire à quelqu’un et que j’ignore ce que ça peut don­ner pour un autre regard que le mien (qui est for­cé­ment par­tial), pour l’instant je ne suis pas rebu­tée par le résul­tat, c’est déjà ça.
    Question sur laquelle je n’ai pas encore de réponse : les idées qui prennent forme au pré­sent seront-elles les mêmes que celles qui nous vien­draient au passé ? Le temps n’est-il qu’un simple outil, ou un moteur d’inspiration ? Vu que pour moi j’ai l’impression que c’est cette der­nière réponse, (voir plus haut, mais ce n’est peut-être pas le cas pour tout le monde), autre­ment dit, une his­toire « tra­duite » du pré­sent au passé sera-t-elle la même ?

    1. nicolas a dit :

      « Les idées qui prennent forme au pré­sent seront-elles les mêmes que celles qui nous vien­draient au passé ? »

      Curieuse et inté­res­sante ques­tion, que je me suis déjà posée. A froid, j’aurais ten­dance à dire non. Et puis, en repen­sant à quelques moments d’écriture (j’ai pra­ti­qué l’écriture au pré­sent et celle au passé suc­ces­si­ve­ment sur la même his­toire), je dirais qu’il y a peut-être bien quelque chose. La nar­ra­tion au pré­sent incite à des nota­tions plus rapides, plus courtes, et plus vagues. Quand l’on écrit au pré­sent, on doit faire plus atten­tion à bien don­ner tous les détails de la scène. Quand on écrit au passé, on doit sans cesse recher­cher des « trucs » nou­veaux pour que le rythme reste ner­veux et mus­clé. Il y a donc peut-être une sorte d’influence du temps de nar­ra­tion sur ce qui est raconté…

  7. Plume d'ange a dit :

    Je me per­mets d’ajouter mon grain de sel.
    Pour ma part je pré­fère écrire au passé (simple/imparfait), mes amis me prennent sou­vent pour une folle à cause de ça. Beaucoup de per­sonnes ne savent pas ou plus conju­guer au passé, ça donne des expres­sions du genre « elle prenna » (si, si, véri­dique !), et du coup pré­fèrent écrire au pré­sent. ça peut aussi expli­quer cer­taines choses ^^

    1. nicolas a dit :

      Oui, il y a sans doute une cer­taine faci­lité à uti­li­ser le pré­sent. Sauf que la dif­fi­culté existe tout de même : il s’agit d’éviter l’écueil de l’ennui…

  8. D !D a dit :

    bon­jour, je com­mence une auto­bio­gra­phie en par­tie fic­tive, et je me trouve face à un pro­blème de temps. j’ai com­mencé par un énoncé entre guille­mets et au pré­sent, ce sont les paroles d’un ami qui s’adresse à moi et qui se ter­minent par « allez, viens avec moi l’an pro­chain ! » , mais l’action se déroule il y a plus de 20 ans. Puis, j’enchaine en disant…et voilà le récit de mon pote Olivier qui reve­nait pour la pre­mière fois de…j’argumente pen­dant quelques lignes en conti­nuant avec l’imparfait, puis l’histoire expli­quant que j’avais acheté un billet d’avion et que je me retrou­vait au jour du départ, je continu l’histoire en com­men­çant par une sorte de titre : La veille du départ

    et là j’écris : Je suis chez mon pote Vincent, il n’a pas plus envie de dor­mir que moi…
    Voilà, du pré­sent, je passe à l’imparfait, puis je reviens au pré­sent, sachant que par la suite, j’écrirais encore par exemple (j’arrive d’un temps pré­sent et je dis ensuite) : à l’époque, j’avais eu l’occasion de visi­ter… puis ma phrase finie je dis : lors de cette pre­mière nuit, je me sens vrai­ment loin de toute civi­li­sa­tion… et je continu au pré­sent . Ma ques­tion est : est-il pos­sible d’alterner les temps de cette façon ? cela ne peut-il pas consti­tuer un style cohé­rent et accep­table ? J’ai relu mon texte plu­sieurs fois, et je n’ai pas l’impression que quelque chose « accroche » à mon oreille…Mais je ne suis pas maitre Capello ! Merci d’avance à ceux qui pour­ront éclai­rer ma lanterne.

    1. nicolas a dit :

      Je lais­se­rai les autres répondre, mais pour moi cela semble quand même confus.

      Bien sûr, cela n’accroche pas à l’oreille si chaque cha­pitre res­pecte sa propre concor­dance. Mais si, d’un cha­pitre à l’autre, la même époque de l’histoire est racon­tée avec un temps dif­fé­rent, le lec­teur que je suis va se grat­ter la tête…

  9. nomade a dit :

    Bonjour,
    J’aimerais savoir com­ment gérer le plus-que-par­fait dans un texte au passé.
    Je trouve que ce temps est indis­pen­sable pour racon­ter des faits anté­rieurs au temps de la nar­ra­tion mais je trouve que ça alour­dit le texte.
    J’essaie de res­pec­ter la concor­dance mais à la relec­ture, ça ne passe pas toujours.
    Merci pour votre aide, si vous pas­sez encore par là ! 🙂

    1. nicolas a dit :

      Le plus-que-par­fait, dans le sys­tème « passé com­posé », sert à par­ler d’un fait anté­rieur au moment raconté : « J’ai fait quelques pas sur le trot­toir. Le jour se levait. Le ciel n’avait pas été aussi bleu depuis six mois. »

  10. Johndoe a dit :

    C’est mon plus gros pro­blème j’ai ten­dance a ne pas res­pecté l’emploi des temps aux récits. Mais je m’efforce de prendre les bonnes habi­tudes incul­quées par l’une de mes anciennes prof de français.

    l’imparfait pour les des­crip­tions, les actions inache­vées ou non déli­mi­tées dans le temps.
    Le passé simple pour le contraire.
    Après c’est selon l’ambiance que l’ont veut donné. le passé simple donne le sen­ti­ment d’une his­toire passé il y a long­temps alors que le passé com­posé don­nera une impres­sion d’actions qui ce sont passé il y a très peu de temps.
    Ce sont je pense des règles de base. en tout cas ce sont les règles que j’ai apprises et aux­quelles j’essaie de me conformé

  11. Estampe a dit :

    Je n’ai même pas eu la patience de ter­mi­ner cet article que je trouve pour le moins pué­ril. Eviter le pré­sent ? Eviter de chan­ger les temps ? Serait-ce un auteur frus­tré de ne pas par­ve­nir à écrire de la qua­lité en diver­si­fiant les temps de ses écrits. En tous cas, s’il fait ce qu’il dit, ses écrits doivent être très ori­gi­naux… Pour les gens qui ont lu cet article, je leur dirai de ne pas en tenir compte et de faire preuve d’originalité avec des chan­ge­ments de temps s’ils en res­sentent le besoin et l’envie. Pour moi, cet article n’est qu’un ramas­sis de pré­ju­gés et de conne­ries qui ne pourra faire que du tort à de futurs auteurs. Ne pas pas­ser du passé au pré­sent, etc… pour­tant des auteurs de talent le font sans pro­blème et cela fait qu’ils sont des auteurs de talent. Prenons l’exemple de Chateaubriand .

    « On le ren­contre à des endroits stra­té­giques, lorsqu’il s’agit d’exacerber le carac­tère dra­ma­tique des actions et des évé­ne­ments repré­sen­tés. Ainsi Chateaubriand, dans René, ménage soi­gneu­se­ment l’accès à la scène clé de son récit (la prise de voile d’Amélie, la sœur du héros), en fai­sant d’abord alter­ner pré­sent et temps du passé :

    Au lever de l’aube, j’entendis le pre­mier son des cloches… Vers dix heures, dans une sorte d’agonie, je me traî­nai au monas­tère. […] Un peuple immense rem­plis­sait l’église. On me conduit au banc du sanc­tuaire ; je me pré­ci­pite à genoux sans presque savoir où j’étais, ni à quoi j’étais résolu. Déjà le prêtre atten­dait à l’autel ; tout à coup la grille mys­té­rieuse s’ouvre, et Amélie s’avance, parée de toutes les pompes du monde.

    Mais lorsque pas­sage atteint son som­met dra­ma­tique, après qu’Amélie a avoué à René sa pas­sion inces­tueuse, le pré­sent his­to­rique s’impose seul :

    À ces mots échap­pés du cer­cueil, l’affreuse vérité m’éclaire ; ma rai­son s’égare, je me laisse tom­ber sur le lin­ceul de la mort, je presse ma sœur dans mes bras, je m’écrie : « Chaste épouse de Jésus-Christ, reçois mes der­niers embras­se­ments à tra­vers les glaces du tré­pas et les pro­fon­deurs de l’éternité, qui te séparent déjà de ton frère ! »
    Ce mou­ve­ment, ce cri, ces larmes, troublent la céré­mo­nie : le prêtre s’interrompt, les reli­gieuses ferment la grille, la foule s’agite et se presse vers l’autel ; on m’emporte sans connaissance. » 

    http://www.unige.ch/lettres/framo/enseignements/methodes/tnarrative/tnintegr.html

    1. nicolas a dit :

      ma foi, cher­cher à contre­dire les prin­cipes que j’essaie d’identifier à tra­vers mes articles, est un jeu qui en vaut bien un autre…

      Seulement, ce n’est pas parce qu’il y a eu Chateaubriand, qu’il faut encore aujourd’hui écrire comme lui. Ce n’est pas parce qu’un grand auteur a eu des licences d’écriture, qu’il faut s’empresser de les adopter.

      Avant d’être Chateaubriand, il s’agit d’être écri­vain. Le roman­tisme était un beau rêve qui a fait bien des malheureux…

  12. Adeline a dit :

    Bonjour,

    Je vous remer­cie pour votre article : je vais essayer dès lors d’être plus stricte dans ma manière d’écrire. Je remer­cie aussi les inter­ve­nants qui nous donnent dif­fé­rentes manièrse d’appréhender les écrits de choses et autres.

    Bien à vous tous, cordialement,
    Adeline

  13. Karl a dit :

    Bonjour,
    Ceci est un article très inté­res­sant pour ma part, mais je reste tou­jours dans mon petit pro­blème : j’écris mes romans à la pre­mière per­sonne du sin­gu­lier et j’u­ti­lise le passe simple/imparfait mais j’in­tro­duis sou­vent des idées ou des choses que je res­sent, je suis donc obligé dans ce cas la d’u­ti­li­ser le pré­sent. Je me deman­dais si c’était une faute de concor­dance des temps ? J’ai donc essayé de réécrire mon roman au pré­sent mais le passé simple/imparfait reprend tou­jours le des­sus, donc je vou­lais savoir si c’est vrai­ment impor­tant de le mettre com­plé­te­ment au pré­sent au lieu de la for­mule passé simple/imparfait avec ce que je pense au présent.
    Merci

    1. Hé hé… Vous êtes typi­que­ment dans ce que je décris avec cet article : l’im­pos­si­bi­lité de faire un choix.
      Et pour­tant, l’é­cri­ture est une suite infi­nie de choix toutes sortes…

  14. Will a dit :

    Bonjour,
    Le nar­ra­teur de mon récit rap­porte les évé­ne­ments durant l’an­née écou­lée. Le texte est volon­tai­re­ment « réflexif ». Le passé s’im­pose. Mais comme le récit se déroule dans un passé très proche (entre il y a un an et hier), je suis mal à l’aise avec les des­crip­tions des lieux et de la société, car elles font réfé­rence à une situa­tion pré­sente et les mettre au passé est une inep­tie par rap­port au sens… Si je raconte mon dîner d’hier soir, dans un res­tau­rant, je vais par­ler des évé­ne­ments, de l’am­biance et de mon res­senti au passé, mais si je situe le res­tau­rant où j’ai passé la soi­rée, je dois uti­li­ser le pré­sent sinon le lec­teur pen­sera que le res­tau­rant ne s’y situe pas… Les formes pas­sés du fran­çais sont conno­tées comme révo­lues (contrai­re­ment au past per­fect de l’an­glais qui exprime en prin­cipe un passé encore en cours…). Le duo passé simple – impar­fait ne me convient donc pas, car les des­crip­tion à l’im­par­fait n’ont pas de sens. Mais écrire tout au pré­sent ne convient pas du tout au récit… Le décor au pré­sent et les évé­ne­ment au passé : ce serait valable ? Tout éclair­cis­se­ment est bienvenu !
    Merci

    1. Ma foi, quand vous décri­vez le res­tau­rant dans ce qu’il a de per­ma­nent, vous vous situez bien entendu en dehors de la concor­dance des temps. Vous consta­te­rez tou­te­fois que les écri­vains pré­fèrent main­te­nir la concor­dance des temps, au détri­ment de ce petit défaut de logique. Au lieu de « Ce soir-là, elle dîna dans son res­tau­rant favori. Il est peint en bleu, avec des filets de pêche accro­chés aux murs. » on trou­vera « Ce soir-là, elle dîna dans son res­tau­rant favori. Il était peint en bleu, avec des filets de pêche accro­chés aux murs. » Et en l’occurrence, l’é­lé­gance du récit consiste à « rame­ner » le per­ma­nent dans le contexte imper­ma­nent : « Ce soir-là, elle dîna dans son res­tau­rant favori. Elle aimait ses murs peints en bleu, et ten­dus de filets de pêche. »

  15. J’ai beau­coup aimé l’ar­ticle. Il est clair et bien fourni en termes d’ex­pli­ca­tions. Cependant j’au­rais une petite inter­ro­ga­tion sur les « termes » uti­li­sés selon les temps. Dans un récit au passé simple nous ne pou­vons pas uti­lisé les mots comme « hier » mais pré­fé­rer « la veille » c’est exact ? Mais est-ce la même chose pour « aujourd’­hui » ? Je ne vois pas com­ment tour­ner mes phrases, ni quel mot uti­lisé à la place et je doute que ce soit cor­rect de le mettre (notam­ment en rai­son des inco­hé­rences de temps entre le verbe et le mot).
    Merci de votre réponse

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