Ce que vous allez apprendre dans cet article :

  • Le vrai risque de pla­giat littéraire
  • Faut-il avoir peur d’internet ?

Le pla­giat lit­té­raire est l’ob­jet de toutes les peurs, chez les écri­vains. Mais faut-il vrai­ment pro­té­ger son manus­crit ? Petit guide de la paranoïa.

Combien de fois ai-je vu, dans un forum ou en mp, une petite phrase sur le thème « J’ai trop peur qu’on me vole mon idée, je pré­fère ne pas mon­trer mes textes » !

Quelle est la vérité sur le pla­giat ? De quoi doit-on avoir peur ? Posons-nous fran­che­ment la ques­tion, sous l’angle psy­cho­lo­gique et technique.

Dans cette pre­mière par­tie, nous par­le­rons de la primo-réac­tion : avoir peur. Dans une deuxième par­tie, il sera ques­tion de for­mu­ler ses craintes et de… se rassurer.

Probabilité du plagiat littéraire

D’abord, que ce soit lâché une bonne fois pour toutes, sinon nous n’en sor­ti­rons jamais : on sur­es­time énor­mé­ment les risques du pla­giat. Le fan­tasme du pla­giat est aussi vapo­reux, aussi irra­tion­nel que « Je vais perdre tous mes droits si je signe un contrat. » Ôtez-vous ces peurs de la tête, elles sont aussi sen­sées que, par exemple, craindre les girafes bleues à Clichy. Tout le monde sait qu’elles ne dépassent pas la porte de Pantin.

Bien entendu, entre écri­vains, on se res­sasse gra­ve­ment les vieilles légendes de la pro­fes­sion : JK Rowling, BHL, Ardisson, Attali, PPDA… Évidemment, il y a de temps en temps une affaire de pla­giat. Là où il y a de l’argent, de la célé­brité et un vilain coup pos­sible, il se trouve tou­jours un vilain pas beau pour le ten­ter. Le pla­giat arrive quel­que­fois, tout comme, quel­que­fois, quelqu’un meurt dans un acci­dent d’avion (0,035 pas­sa­ger pour 100 000 000/km). Est-ce qu’on ne prend plus l’avion pour autant ? Non, n’est-ce pas ?

Et puis entre vous et JK Rowling, le coef­fi­cient de menace n’est pas tout à fait le même. Se faire peur avec les grandes affaires du monde de l’édition, c’est très plai­sant, mais pas très sérieux. Est-ce que vous jouez vrai­ment (pour l’instant) dans la même cour que Harry Potter ? À votre petite échelle d’enjeu et de rému­né­ra­tion, dites-moi donc qui irait s’embêter à vous plagier ?

Forces en présence

Voyons un ins­tant les inté­rêts que pour­raient trou­ver les uns et des autres au pillage de votre œuvre littéraire :

  • Les autres auteurs (façon Décalogue tome 1) : posez-vous la ques­tion à vous-même. Voudriez-vous faire l’œuvre d’un autre ? On ne vous a jamais dit « Toi qui écris, tu vou­drais pas racon­ter cette his­toire » ? Comment avez-vous réagi ? La tuile, n’est-ce pas ? L’histoire d’un autre, peuh ! Eh bien, vous croyez fran­che­ment être le seul écri­vain à rai­son­ner ainsi ?
  • Les édi­teurs : d’après vous, quel est l’intérêt de vous publier dans votre dos, sans vous deman­der votre accord ? Ne pas vous payer votre part des béné­fices ? Il est bien plus facile pour l’éditeur de vous « signer », puis de vous lais­ser lan­ter­ner pour vous payer vos droits. Pas besoin de ris­quer un pro­cès ; un peu de mau­vaise foi admi­nis­tra­tive est bien plus efficace.
  • Les lec­teurs lambda : Vous y croyez, vous, au lec­teur lambda qui tombe sur votre texte, et décide de tout lais­ser tom­ber pour se lan­cer dans une car­rière usur­pée d’écrivain à suc­cès ? Moi, l’invasion de vénu­siens me paraît net­te­ment plus mena­çante, sur l’échelle des pro­ba­bi­li­tés. Sans comp­ter qu’il vous sera assez facile, même sans pré­cau­tion spé­ciale, de prou­ver l’antériorité de votre propre texte…
Plagiat littéraire : y a pas de sushis...
Les risques de pla­giat lit­té­raire sont aussi cou­rants
que les sushis au parmesan

Internet

Enfin, der­nier aspect, plus récent, du fan­tasme du vol de texte : Internet. Là aussi, on entend tout et n’importe quoi sur ce grand espace informe qu’est Internet. Dites-vous quand même que ce n’est pas parce qu’il traîne sur un forum que votre texte sera fabu­leu­se­ment mis en lumière. Au contraire, il sera même plus ignoré que s’il se retrouve sur un sup­port papier adressé à X ou Y.

Ce qui peut vous arri­ver de pire, si vous pos­tez un extrait de prose sur le Net, est qu’un édi­teur la voie, et décide comme ça, pif pouf, d’entamer le dia­logue. Mais ras­su­rez-vous, vous avez net­te­ment plus de chances de vous gau­frer en avion.


Et toi, crain­tif inter­naute, as-tu déjà été pla­gié ? Eh ben alors… !

13 commentaire

  1. lael a dit :

    excel­lente mise au point !

    dans mon cas j’ai cessé de cou­rir après « com­ment pro­té­ger mes textes » lorsque j’ai réa­lisé qui cela les pro­té­geait uni­que­ment à pos­te­riori, après avoir décou­vert le plagiat.
    Si le pla­giat est déjà peu fré­quent, rajou­tez en plus l’idée qu’il faut qu’il crée assez de buzz pour qu’on soit au cou­rant, ça devient des pro­ba­bi­li­tés vrai­ment infinitésimale.

    1. nicolas a dit :

      Absolument, Lael. Déposer son manus­crit est sacré­ment chro­no­phage, et je ne crois pas que les écri­vains débu­tants aient du temps à revendre…

  2. Kanata a dit :

    Nous en sommes en 2011, ère du digi­tal. Toute ten­ta­tive de pla­giat à mon encontre consis­te­rait à jouer un match à domi­cile… gros han­di­cap pour la par­tie adversaire 😉
    Le pla­giat, il a mal­heu­reu­se­ment bien pignon sur rue comme le montrent les affaires récentes. On pille volon­tiers les bou­quins déjà édi­tés, mais s’abaisser à « voler » le fruit d’un inconnu ? Pour quoi faire ?

  3. Céline Laurent a dit :

    Merci d’aborder le sujet. Personnellement, ma pro­duc­tion lit­té­raire est embryon­naire, et pour­tant j’hésite à la pré­sen­ter sur mon blog. Le pré­texte pour ne pas le faire est la peur du plagiat !
    Je peux être ras­su­rée, d’après vous. Et si mes écrits pros­pèrent chez un autre, c’est qu’ils avaient quelque inté­rêt …Sur ce, je me jette dans le grand bain.

  4. caro30 a dit :

    Bonjour,

    Je sais par expé­rience que le pla­giat est à tout niveau, mais plus faci­le­ment sur des petites fic­tions sur inter­net où il y a aucun inté­rêt finan­cier. Les trois quart sont des jeu­nettes qui cherchent une cer­taine recon­nais­sance par rap­port au nombre de com­men­taire. Personnellement ça ne m’est jamais arri­vée, mais je connais de nom­breux cas. Maintenant en ce qui concerne l’édition, je ne vois pas trop l’intérêt, il faut être réa­liste s’ils pensent que c’est un très bon livre, ils réflé­chi­ront for­cé­ment à l’avenir. En espé­rant que l’auteur en publie d’autre, ce n’est donc pas leur avan­tage que de « voler » le livre, sans comp­ter qu’on est loin de la noto­riété reconnu de cer­tains auteurs.

  5. Oliv a dit :

    Je n’ai rien à redire sur le contenu de ton article, clair, concis et per­ti­nent… En revanche je suis tou­jours aussi effaré lorsque je me rends compte qu’il faut sans cesse rabâ­cher les mêmes choses à ce sujet, qu’il faut sans cesse ras­su­rer, sans cesse remettre les choses en pers­pec­tive… Les auteurs ama­teurs ne seraient-ils que des enfants à qui il faut répé­ter chaque soir que le vam­pire caché sous leur lit n’existe que dans leur tête ?

    1. nicolas a dit :

      En même temps, si les auteurs ados croient qu’il y a un vam­pire sous leur lit, ils ne dor­mi­ront plus très sou­vent entre leurs draps 😉

  6. Izru a dit :

    Pour le peu que j’écris… je ne crains pas le pla­giat. Je trouve cette crainte vague­ment ridi­cule, sans doute parce que je n’ai pas à vivre de mes mots. Se faire pla­gier, c’est comme s’entendre dire : ce que tu as écrit, c’est si bien que je ne peux pas m’en déta­cher. C’est un com­pli­ment qui ne fait pas grand mal.

    Quant à se faire voler un texte com­plet… s’il est si bien, l’un des pro­chains le sera pro­ba­ble­ment aussi. Même si l’on perd ainsi trois ou quatre ans de boulot.

    1. nicolas a dit :

      En même temps, il y a des formes de pla­giat qui se rap­prochent plus de l’escroquerie, de la spo­lia­tion finan­cière. C’est sur­tout cette variante-là qui effraie, je pense, la plu­part des écrivains.
      Mais comme d’autres peurs irrai­son­nées, comme le monstre sous le lit ou la peur du vide, il faut apprendre à la mépri­ser et à vivre avec. On ne peut pas gar­der tou­jours la lumière allu­mée dans sa chambre, on ne peut pas vivre tou­jours au ras du sol, n’est ce pas ?

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